Le Navire de bois

Couverture du livre Le Navire de bois

Traduit de l'allemand par René Radrizzani

Juin 2007

256 pages

Les Massicotés

978-2-7143-0950-1

Ouvrage réédité en 2025 :  Le Navire de bois

Achevé en 1936, Le Navire de bois constitue le premier volet de la trilogie romanesque publiée à titre posthume par Walter Muschg, Fleuve sans Rives. Comme Andreas de Hoffmannsthal, Le Procès de Kafka et L’Homme sans qualités de Musil, la trilogie fait partie des grandes œuvres en prose de notre siècle restées inachevées. Comme dans ses autres œuvres, et notamment son théâtre, Jahnn conduit ses personnages jusqu’au point de rupture où les forces, soudain libérées, se déchaînent. « Ce que nous accordons aux tragiques du passé, écrivait Hans Wolffheim en 1966, à propos de l’auteur du Navire de bois, nous devons le concéder au poète moderne : d’être, au-delà des conventions bourgeoises, un créateur de mythes, de proposer donc des Images archétypiques de l’homme qui font peut-être éclater ces conventions. Il se pourrait qu’on y découvre plus de vérité que dans les icônes confortables de nos normes sociales. »
    

Chez Jahnn, comme chez Kafka, des acteurs cheminent sans but, presque sans chemin. Ils n’avancent plus, de peur de reculer. Ils voudraient marcher, s’élancer, mais ils craignent de marcher à l’envers. Jamais plus les pas ne s’enchaînent. Tout l’effort de l’écrivain consiste à les égarer davantage, à les perdre, car l’idée du « chemin » est encore une entrave : « quand on dit que le chemin est plus important que le but, c’est en souvenir d’un début où ils ont été identiques. » (Jünger, Les Ciseaux)
   

Pour complaire à sa fiancée, la fille d’un capitaine de marine, Gustav décide à l’improviste de l’accompagner dans un voyage sur un étrange navire de bois, véritable labyrinthe, transportant une cargaison mystérieuse vers une destination inconnue. Seule femme à bord, Ellena devient l’objet des fantasmes de tous les hommes. Un jour, elle a disparu ; en tentant de la retrouver, Gustav provoque involontairement le naufrage du navire.
À la fois roman de haute mer, de la veine des Melville et Conrad, mettant l’homme aux prises avec les éléments, et intrigue policière, comme Le Procès de Kafka, ce récit allie un réalisme intense à un univers intérieur et symbolique : le mystère ou l’absurdité de l’existence, la solitude des êtres, leur obscure culpabilité.

Hans Henny Jahnn

Hans Henny Jahnn (1894–1959) était un romancier, dramaturge et facteur d’orgues allemand. Antimilitariste et adversaire résolu du nazisme, figure exemplaire d’une lutte pour la défense de la vie sous toutes ses formes, il a laissé une œuvre baroque, noire, singulière, considérée comme l’une des plus originales de son temps. En savoir plus.

Presse et librairies

Toute l’humanité est embarquée sur ce navire. Pas seulement pour signifier, avec quelle force allégorique, la tragédie du nazisme, ce mélange d’épouvante grossièrement bariolée et de froide moquerie. Non, l’humanité que Jahnn lance dans la tempête est la nôtre, celle du siècle, dévorée par l’irrationnel, celle qui sait que « l’effroi est plus prompt en nous que l’envie de jouir ».
Le vrai sujet du Navire de bois, c’est cette « chaude obscurité », pétrie par les mythes et par le cosmos tout entier, sur laquelle Jahnn jette quelques fulgurants éclairs, grâce à l’étrangeté d’une écriture entre Broch et Kafka : ample ou hachée, métaphorique et descriptive à la fois incarnée et tout soudain méditative.

Jean-Pierre Maurel, La Croix, 15 novembre 1993

Un roman irréel fait de mystères, de métaphores, de mythes et de métamorphoses.

Dernières Nouvelles d’Alsace, 24 novembre 1993


L’univers dépeint n’a de rapport avec Kafka que parce qu’il révèle une outrance, un monde où ne règne pas le trop-plein mais un vide atroce, un esseulement tel que « la rencontre avec autrui, même sous la forme de l’agression, est devenu impossible ».

Claude-Henry du Bord, Études, décembre 1994