Cimetière de Sinera
Traduction de Albert Bensoussan, Mathilde Bensoussan et Denise Boyer.
On trouvera ici trois recueils poétiques de Salvador Espriu (Catalan, 1913–1985) où la “méditation de la mort” – dont l’auteur disait qu’elle était “l’axe” de son œuvre – prend les tonalités les plus diverses. Cimetière de Sinera (1946) et Les Heures (1952–54) évoquent en effet dans un registre élégiaque un monde détruit à tout jamais par la guerre civile et la disparition d’êtres bien-aimés : le “monde perdu” de Sinera, espace mythique qui jusque dans sa réalité typographique est comme l’envers de la ville réelle d’Arenys de Mar, berceau de la famille Espriu. À l’opposé, dans Semaine Sainte (1971), la Passion du Christ et les cérémonies religieuses qui la représentent débouchent sur des “méditations de la mort” d’une autre nature, traitées cette fois-ci sur le mode grotesque : misère du peuple de Sepharad – figuration d’un peuple espagnol brisé par l’ “exil intérieur” comme le peuple juif par la Diaspora – ; et encore au-delà misère d’une condition humaine que l’existence de la mort voue à une fondamentale absurdité.
Presse et librairies
Un tel recueil a le mérite de présenter au public français les poèmes mystiques et familiers, lyriques et sévères, épurés jusqu’à donner l’image de l’infini, d’un écrivain qui a longtemps craint que le catalan fût “mort”.
M. Borrut, Les Livres, novembre 1981