Lettres aux amies et amis proches

Traduction de Claire Malroux.

Janvier 1999

424 pages

Série américaine

978-2-7143-1084-2

24.35 €

Claire Malroux a rassemblé en un seul volume les correspondances féminines et masculines d’Emily Dickinson, publiées il y a quelques années.

Ces correspondances ont un point commun : elles ont poussé Emily Dickinson à forger une prose aussi incandescente que sa poésie, à créer une forme littéraire sans équivalent. Un entrelacement de prose haussée au niveau de la poésie, et de poésie, tantôt ramenée presque au niveau de la prose, tantôt culminant en fulgurations ou éblouissantes condensations. On pourrait parler de texte-Centaure, ou plutôt de texte-Pégase, dont le corps de prose-cheval battrait au rythme d’ailes de poésie.

Lettres de haut vol, donc, gardant intacte, au travers d’émotions contradictoires ou de surprenants messages, la force du secret d’où procède toute l’œuvre.

“Une lettre me donne toujours l’impression de l’immortalité parce qu’elle est l’esprit seul sans ami corporel. Tributaire dans la parole de l’attitude et de l’accent, il semble y avoir dans la pensée une force spectrale qui marche seule.”

Emily Dickinson, Lettre à Thomas W. Higginson

Plus qu’aucune autre correspondance, peut-être, celle de Emily Dickinson est une œuvre de création, un terrain littéraire ou dramatique où le poète est à la recherche d’un moi à la fois réel et fictif, plus authentique que le moi perçu par le société. Un dialogue entre soi et soi, devant un tiers privilégié, plus proche que le public inconnu auquel s’adressent en dernier ressort les poèmes.

Emily Dickinson se sent de plain-pied avec les femmes, et sans doute même a-t-elle conscience de la supériorité que lui confère son génie d’artiste. Elle peut partager avec elles à demi-mot certains sentiments, certaines aspirations, s’abandonner aussi, non sans ironie, au bavardage à propos de la vie quotidienne, se défouler de la tension à laquelle la soumet son activité de poète.

Claire Malroux

Emily Dickinson

Considérée aujourd’hui comme l’un des plus grands poètes américains, Emily Dickinson n’eut pas droit à la reconnaissance littéraire de son vivant. Presque absente de la scène littéraire, elle fut également peu présente dans le théâtre de la vie. Son champ d’expérience fut limité, puisqu’elle ne s’éloigna d’Amherst que pour passer une année au collège de Mount Holyoke à South Hadley ou lors de rares séjours, à Washington ou à Boston. Il semble donc qu’elle n’ait guère quitté le cercle de cette petite communauté puritaine de Nouvelle-Angleterre, ni franchi le seuil de la maison familiale où elle disait tant se plaire – entre son père juriste et homme politique, admiré et craint, et sa mère plus effacée ; entre sa sœur Lavinia, qui ne partit jamais non plus et son frère Austin, installé dans la maison voisine avec sa femme Susan, amie de cœur de la poétesse. Le choix d’un certain retrait du monde livre un signe essentiel : la mise à distance, l’ironie. Mais, à certains égards, ce retrait fut peut-être moins absolu qu’il n’y paraît : tout en se dérobant au monde, au mariage, elle adressa des lettres passionnées à divers correspondants masculins. La fin de sa vie fut marquée par des deuils répétés (son père en 1874, sa mère en 1882, son neveu Gilbert, mort à l’âge de huit ans en 1883, Otis P. Lord en 1884). Secrète et expansive, grave et moqueuse, discrète mais audacieusement libre, sa personnalité est aussi complexe que l’espace réel de son expérience fut restreint. En savoir plus.

Presse et librairies

À travers ses lettres au mentor à ami et l’amant, la poétesse américaine Emily Dickinson déploie d’habiles jeux de séduction comme autant de témoignages de son rapport trouble au masculin.

Stéphane Bouquet, Hommes sweet Hommes, Libération, 17 juin 1999

La traductrice, Claire Malroux, qui avait réalisé le recueil de poème, apporte le même soin à ce nouveau travail qui, par la richesse des notes une précieuse préface à chaque correspondance, permet de réaliser à quel point ce livre non seulement ne démérite pas devant l’œuvre poétique mais s’avère être une des plus belles correspondances qui soit.

Marc Blanchet, Le Matricule des Anges

Florilège : désignant un recueil de pièces choisies, le mot a pour origine la cuillette des fleurs ; art qu’Emily Dickinson pratiqua suprêmement, au propre comme au figuré.

Marc Porée, La Quinzaine Littéraire, Juin 1999