Le Livre du retour

Janvier 1993

256 pages

Domaine français

978-2-7143-0472-8

15.45 €

Après La Distance de sable (Granit, 1983), Lectures du vent et L’Or de l’incertitude (Corti, 1988 et 1990), Silvia Baron Supervielle fait paraître un nouveau recueil de poèmes, L’Eau étrangère, et surtout un nouveau récit, Le Livre du retour, manière de livre intranquille à l’usage des voyageurs de ce temps, qui ont perdu leur ombre.

Lie-Tseu disait des morts qu’ils étaient des hommes « rentrés » ou « retournés » et des vivants des « hommes de passage » : « Un voyageur qui ne retrouverait pas le chemin du retour serait sans domicile. » C’est à une semblable quête que la narratrice du Livre du retour paraît condamnée. Entre le rivage du départ et celui du retour, la mer demeure l’infranchissable distance. « Il se peut que la mer soit la conséquence d’un départ. Qu’elle ait pris naissance dans les larmes des morts séparés – qu’à la suite de cette secousse qui a divisé la terre en deux, en un instant, telle une cataracte jaillie du bas et du haut, la mer a rempli la tranchée, nous laissant toi sur une côte et moi sur l’autre. »
L’exil, la mer, est séparation d’avec soi-même. « La mer organise notre lumière ; elle est notre centre, notre industrie, notre voyage. Elle nous a été accordée en substitution. Puisqu’il ne nous est plus permis de nous voir, un miroir a été répandu à nos pieds. »
Au moment d’entreprendre le voyage, un courrier lui refuse l’autorisation de se rendre sur place, d’aborder aux rives du départ. Elle ne fera plus partie de ce côté-là de la mer, de la terre, des siens, de ses morts, ni de sa langue : « Celui qui a été frappé d’un départ ne sera en aucun cas autorisé à reprendre le voyage du retour. » Gloria non plus n’a pas franchi la mer. Prisonnière du phare de Longstone, en compagnie de son père, elle ne s’est jamais rendue sur le continent. À partir de la nuit du naufrage, elle est devenue cette héroïne dont un livre fait revivre les exploits – avant que la mer ne l’appelle à son tour. La narratrice consulte le livre de ce naufrage, qui est aussi celui de Gloria, interroge les estampes du phare de Longstone, et chevauchant Adiós, longe la mer, tente de « récollectionner le Livre du retour ». D’où est-elle ? Où ira-t-elle ? Ne pourrait-elle pas, comme Gloria, prendre les devants ! « Le rivage me paraissait une terre neutre où la guerre prenait fin. La terre s’y muait en sable. En sable de l’au-delà. »

Silvia Baron Supervielle

Silvia Baron Supervielle est née à Buenos-Aires en 1934. Sa mère qui mourut lorsqu’elle avait un an était uruguayenne de descendance espagnole et son père était argentin de descendance française. Elle commença à Buenos-Aires son travail littéraire, en espagnol, sa langue natale, écrivant des poèmes et des nouvelles. En 1961 elle arriva en France et se fixa à Paris où, après une longue période de silence, elle poursuivit ses écrits directement en français et fit de nombreuses traductions de l’espagnol en français et vice-versa. En 1973 Maurice Nadeau accueille ses poèmes dans la revue Les Lettres Nouvelles. En savoir plus.

Presse et librairies

L’histoire est ténue ; les paysages peints d’un seul coup de pinceau, se dérobent en leurs détails ; ce qui paraît à portée de la main se dissout, se fond dans l’ailleurs des ailleurs perdus ; et les visages n’ont pas de traits ; c’est le regard, non pas les yeux, qui attire l’auteur : c’est l’âme qu’elle voudrait débusquer, et l’esprit en tête-à-tête avec lui-même qui lui importe… Cette pudeur est souvent magnifique dans les pages de ce livre du retour, où le langage… jouit d’un état de bonheur dont il est lui-même la source.


Hector Banciotti, Le Monde


Flux et reflux, ses mots comme les vers qu’accoutumée elle tresse, emmène sur les crêtes d’un au-delà sans histoire.


Frédérique Roussel, Le Matricule des Anges