Fille
Traduit de l'allemand par Fernand Cambon.
Fille : dans ces quelques pages, serrées et vibrantes, une mère, Rahel Hutmacher, face à sa fille, en une sorte de huis-clos. Mais huis-clos qui est ouvert sur la nature, traversé par les vents et la neige, envahi par tout un bestiaire mouvant. Ce « monde » est, réellement et apparemment, celui du conte. Et Rahel Hutmacher ne se prive pas de jouer à la sorcière. Cependant, de même qu’une sorcière n’est pas que méchante, qu’elle détient des savoirs, pouvoirs et secrets transmissibles, de même, le conte « de fées », déjà dans la tradition, n’est pas qu’idyllique. Et, si Rahel Hutmacher s’entend merveilleusement à jouer du merveilleux, c’est pour nous faire entendre, comme par antiphrase, de quelles tensions, de quelles inquiétudes, voire de quelles violences la relation mère-fille, immémoriale et ultramoderne, est tissée, jusqu’au déchirement.
Dans cette prose, tout est bref : le livre entier (publié en allemand en 1983), chacun de ses chapitres qui sont autant de poèmes en prose, chaque phrase, chaque mot. Ce que le lecteur retiendra sans doute au terme, c’est un certain rythme, unique, inimitable, comme une respiration haletante d’attention et d’inquiétude. C’est donc à une enfilade de variations musicales sur quelques motifs désespérément obstinés que nous sommes invités.
Presse et librairies
Les livres ont une vie secrète et imprévisible. Un trésor a manqué se perdre, épuisé dans la langue originale, presque oublié. Grâce à l’obstination de son traducteur, Fernand Cambon, « Fille », de la Zurichoise Rahel Hutmacher, connaît une nouvelle existence.
Isabelle Rüf, Le Temps, 13 mars 2010C’est un trésor à découvrir dans cette collection de Corti où figurent notamment Robert Walser et Tatiana Arfel : « Fille », un conte fascinant de Rahel Hutmacher (née à Zurich en 1944). Présenté et traduit par Fernand Cambon, le livre met en scène un face-à-face entre mère et fille, dans un espace traversé par la neige et le vent.
Monique Petillon, Le Monde, 12 février 2010Voici un joyau, espace de liberté et de respiration arraché à la trivialité et à la tristesse. Rahel Hutmacher (…) réussit ce que nombreux ont tenté : une représentation ardente, haletante, fébrile, tourmentée, d’une relation de mère à fille.
Marta Krol, Le Matricule des Anges n° 109, janvier 2010L’absence peut-elle se dire mieux que dans l’esthétique du fragment ? Le conte tend en réalité vers le poème en prose, et la poéticité même de la langue employée nous inviterait à adopter plutôt ce repère. Plutôt comptine que conte d’ailleurs, le livre de Rahel Hutmacher n’a de cesse de nous faire entendre sa petite musique de l’abandon, en formules courtes, syntaxe souvent brève, à la limite du verset, comme une chanson ou un secret.
Virginie Rodde, La Quinzaine Littéraire, 15-28 février 2010