Comment dépeindre
« Écrire m’a appris à peindre ». Aurélie Foglia témoigne ici du dialogue qui s’est noué entre deux pratiques, écrire peindre, soit « peindre avec la langue ». Ces deux gestes se questionnent sans cesse, se croisent et se creusent, s’entretissent, se recouvrent, se révèlent et s’effacent réciproquement dans ces va-et-vient de verbes, « décrire peindre écrire dépeindre désécrire ».
Seuls sujets, suffisants, inépuisables, les arbres reviennent s’y déployer sur la page en regard des toiles. Ce qui s’engage avant tout, c’est une réflexion et un travail sur la main et sa manière : main qui « caresse les arbres », qui éprouve directement, sans « gants », le contact de la matière, du temps et des couleurs.
Un tel épanouissement, visible dans les trois premières « saisons » du livre, a connu son revers dans la vie. Il se trouve que la totalité des toiles a été détruite, par un homme alcoolique et violent, jaloux de cette part de création. C’est pourquoi Comment dépeindre, commencé comme une sorte de « journal d’ate/lier », et soudain forcé de prendre acte de cette catastrophe, devient, dans sa dernière saison, « un livre en deuil des images ».
Les questions qui se posent, concrètes et sociétales aussi bien qu’esthétiques, reconduisent d’époque en époque toute leur actualité, tristement haletante : quel espace fragile, trop vulnérable, accordé à la création féminine ? Comment dépeindre est un livre qui dit, qui crie la stupeur, le traumatisme, littéralement la sidération.
Presse et librairies
Être témoin de la création d’un néologisme pertinent est chose rare. Ainsi, Aurélie Foglia forge-t-elle le mot articide pour qualifier la violence destructive dont elle fut victime, « qui m’a mutilée de peindre / m’a coupée de mes mains / rendues muettes » (p. 155).
Yves Boudier, Poezibao, 9 décembre 2020Le grand mérite de ce dernier livre d’Aurélie Foglia est de parvenir, magnifiquement, sans rien céder quant à l’exigence d’un vers à la fois dense et fluide, à faire valoir haut et fort qu’il y va aussi d’une poésie de l’expérience, autrement dit de la capacité du poème à se faire l’écho d’un vécu – en l’occurrence un vécu où résonnent douloureusement quelques-unes des questions les plus cruciales de notre époque.
Jean-Claude Pinson, Sitaudis, 25 novembre 2020Le titre du livre pose d’emblée ce paradoxe du geste artistique. Dépeindre, c’est à la fois faire et défaire. Ce livre est donc tout autant une interrogation sur la manière de faire de l’art qu’une réponse à cette interrogation, sorte de manifeste poétique de la création artistique.
Guillaume Curtit, Poezibao, 17 février 2021La poète et artiste peintre Aurélie Foglia rend compte dans son dernier livre d’une triple expérience : celle d’une poète qui écrit sur l’acte d’écrire, d’une peintre sur celui de peindre (quels liens entre les deux ?), enfin d’une femme victime d’articide de la part de son compagnon violent.
Marilyse Leroux, Recours au Poème, 21 juin 2021De poème en poème se précise l’art de peindre d’Aurélie Foglia. La poète s’affirme comme peintre en action dans son corps-à-corps avec la toile. Elle se fond à elle, respire par elle, en elle et avec elle, colle à la matière qui prend forme. La poète dépeint — au sens de « décrit » — étape par étape, le parcours franchi en symbiose avec l’acte de peindre : le choix de la toile, les essais, le rôle des doigts.
Angèle Paoli, Terres de femmes — Source