Voyage autour du monde

Traduit par .

Préface de Jacques Brosse.

336 pages

Domaine Romantique

978-2-7143-0410-0

18.55 €

N’est-il pas étrange qu’il ait fallu cent cinquante ans pour qu’on s’intéresse enfin à cette œuvre capitale d’un auteur aussi célèbre ? Sans doute, Chamisso fut-il victime de cette ségrégation qui fait qu’en France un auteur ne peut jouer sur plusieurs tableaux et n’a droit qu’à un seul personnage – on avait accepté le conteur, mais refusé le voyageur naturaliste. Peut-être aussi cette ambiguïté ne faisait-elle qu’accentuer celle que, sans oser le dire, on reprochait à ce Français qui de son plein gré avait choisi l’Allemagne. En tout cas, chez nous, Chamisso jouait décidément de malchance, puisque la traduction de 1981 ne fit qu’une timide apparition et aussitôt disparut (Voyage autour du monde 1815-1818, Édition Le Sycomore). L’auteur de Peter Schlemihl restait à demi méconnu. Car le Voyage autour du monde nous révèle l’autre face de l’écrivain romantique, tel le revers d’une pièce de monnaie ; en complétant son portrait, il nous le rend plus proche encore et plus fraternel.
Je rouvris Peter Schlemihl et, presque à la fin du conte, je lus : « Exclu de la société humaine à la suite d’une erreur de jeunesse, j’étais par compensation invité à me tourner vers la nature que j’ai toujours aimée ; la terre m’était offerte comme un riche jardin, l’étude fournirait à ma vie une direction et une énergie dont le but serait la science. Ce n’était pas une résolution que je prenais de moi-même. Je n’ai fait depuis lors dans mon zèle silencieux, austère, infatigable, qu’essayer de donner une image fidèle de ce qui apparut alors à mon esprit, en pleine lumière et perfection, dans sa forme première, et, si je fus satisfait de moi-même, ce n’a été que dans la mesure où les images que je traçais ressemblaient à la vision première. »
Cet avenir, le seul possible, qui dans Peter Schlemihl n’était qu’un rêve lié à la possession des bottes magiques, Chamisso le réalisa donc, et tout aussitôt. Son Étrange histoire de Peter Schlemihl fut publiée, non par lui d’ailleurs, en 1814. Un an plus tard, Adalbert von Chamisso partait faire le tour du monde.
Extrait de la préface de Jacques Brosse.

Adalbert Von Chamisso

Adelbert von Chamisso (1781 - 1838) est un poète, écrivain et botaniste franco-prussien. En savoir plus.

Presse et librairies

Si l’influence de Rousseau et de Bernardin de Saint-Pierre est évidente (dans ce Voyage autour du monde), il s’y mêle la plénitude que Chamisso l’exilé – celui qui écrivait à madame de Staël : “Je suis un étranger partout” – a cru retrouver dans un monde sans marges et sans exclusion. Mais ce voyage l’amènera aussi  – lui qui a laissé son nom à une île… – à être enfin reconnu en Allemagne ; à son retour à Berlin, il est nommé docteur et appelé à la direction du Jardin botanique. Dès lors, et jusqu’à sa mort en 1838, installé dans une solide réputation d’explorateur et d’homme de science – en même temps que de poète –, Adalbert von Chamisso n’écoutera plus jamais l’appel du large ; il aura définitivement rejoint son ombre.

Noël Herpe, Les Bottes de Chamisso, Libération, 16 mai 1991.