La Rose de personne
Traduit de l'allemand par Martine Broda
La Rose de personne, publié en 1963, est le quatrième volume du poète d’expression allemande Paul Celan, naturalisé français dans les années cinquante. Né à Czernowitz (en Bucovine, province actuelle de l’Ukraine), sa vie et son œuvre sont à jamais marquées par la persécution des Juifs : ses parents meurent dans un camp nazi, il est lui-même l’un des survivants d’un camp en Moldavie. Il épouse Gisèle de Lestrange, graveur, en 1952 et enseigne à partir de 1959 la littérature allemande à l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm. Il se donne la mort à 50 ans en 1970 en se jetant dans la Seine.
Puisque le poète écrit dans la langue « maternelle » qui est aussi la langue du bourreau, Celan invente une langue dans la langue, il la refait du dedans, en construisant, dans la pure tradition hermétique, une langue autonome qui parvient à traduire l’intraduisible. Arracher la langue à elle-même, au seuil de l’abîme, pour atteindre la forme la plus achevée de liberté : la terra incognita du verbe, telle fut l’entreprise inouïe de l’un des plus grands poètes du XXe siècle.
Ce recueil, composé de quatre « cycles », constitue le centre de l’œuvre. Les poèmes ont été écrits entre 1959 (date de parution de Grille de parole) et 1963. Ici, Celan « s’aventure aux confins de sa poésie ». Créer revient à extraire la liberté du néant que le verbe transmue en abondance.