Contre Céline

Mai 2013

192 pages

Les Essais

978-2-7143-1112-2

15 €

« Nous devons appartenir à une petite communauté de lecteurs trop sensibles. Nous sommes trop émus, sans doute, par des questions qui n’ont rien à voir avec la littérature, pour nous extasier sur un style sans nous soucier du sens, pour éprouver à toute page le sentiment pur de la beauté quand l’interprétation de l’histoire contemporaine est en jeu. Nous ne parvenons pas encore à rire tout à fait de tout - ce qui ne nous empêche nullement de rire parfois de ce dont les autres ne rient pas. »

Jean-Pierre Martin

« Si je tiens compte de mon statut social, de mon parcours officiel, de ma place dans le monde, je dénombre, à partir de l’adolescence, au moins cinq vies qui se découperaient à peu près ainsi : étudiant mal dans sa peau (quatre ans), ouvrier provisoire (cinq ans), baba cool assez speed, artisan et apprenti pianiste de jazz (dix ans), enseignant dans le secondaire (cinq ans) et, depuis (faut-il dire enfin ?), professeur d’université.
Traversant ces vies successives, j’ai fréquenté des milieux différents (étudiants gauchistes, ouvriers, babas, routards, artisans, musiciens, universitaires, écrivains), j’ai parlé différents langages (n’étant pas assez aristocrate pour imposer à tous, jusqu’aux garçons d’étage, comme M. de Charlus, un langage unique) et j’ai revêtu divers costumes : bleu de chauffe, tuniques indiennes, salopettes oshkosh, veste chinoise de la marque anti-Cher… J’ai longtemps porté des cheveux longs ; et plus longtemps encore, une moustache dont on aurait pu croire qu’elle faisait partie de moi et qui me semble cependant aujourd’hui plus qu’étrangère : étrange. Le jour où je l’ai rasée, cette moustache, à Francfort-sur-le-Main, pourrait être considéré comme une date historique, celle d’une révolution intérieure
Suis-je redevenu celui que j’étais ? Boucle bouclée ? Tribulations, déviations, bifurcations, puis retour à la case départ ? Fait de tous ces moi, je ne suis aucun d’eux. Je me suis construit avec et contre eux. J’ai changé. » En savoir plus.

Presse et librairies

Le Céline dont il s’agit ici n’est pas le Céline du romantisme noir, celui du Voyage au bout de la nuit (ou de Mort à crédit), auquel on a tendance à identifier toute l’œuvre. C’est plutôt l’auteur qui de l’Église, son premier texte antisémito-littéraire, à Rigodon, son testament xénophobo-romanesque, ne cesse de s’affirmer avec des flux et des reflux d’ostentation, comme un barde de la purification ethnique. C’est Céline tout entier écrivain raciste, polémiste et politique.

Le Monde libertaire, 1997

Jean-Pierre Martin montre implacablement comment Céline indiqua lui-même à ses lecteurs hypnotisés comment il fallait le défendre : au nom du style. Comment il ne cessa jamais de louanger sa propre « musique », son « art inimitable »… Comment, sous couvert de sacro-sainte esthétique littéraire, Céline ne cesse de créer entre lui et son lecteur un « espace restreint mais privilégié d’intimité-publicité […] où le trafic des mots et des idées peut se faire en toute impunité ». Et quels mots, quelles idées ! Le livre de Jean-Pierre Martin est précieux, passionnant et très instructif. Tous les pièges grossiers que Céline a tendus à la critique littéraire ont fonctionné. À lire d’urgence.

Philippe Val, Charlie Hebdo, 19 mars 1997

On ne peut faire l’économie du sens et de la responsabilité de l’écrivain. Au-delà des pamphlets, interdits, l’œuvre de Céline est traversée par l’histoire et nourrie d’une rhétorique de la haine plus ou moins visible… Souvent plus.

Corinne Denailles, Politis, 29 mai 1997